Lettre non datée de Joseph ERHARDY à Michel CHARPENTIER
L’AUTRE JOURNAL – juillet-août 1985
Texte de Romaine FREEMAN.
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Catalogue Exposition Michel CHARPENTIER
Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris (énsb-a) du 14 juin au 22 juillet 1991. Texte d’Yves Michaud
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Propos recueillis, 2003
Ecriture en live
Le 16 mars 2024, dans le cadre d’une performance artistique, en hommage à Michel Charpentier (1927-2023).
Printemps des poètes 2024 sur le thème de « La Grâce ».
A l’initiative de l’association Pact en Vexin et des Editions Envolémoi.
Le bois enfiguré
Agrippés dans le lierre
Les yeux évadés du primat végétal
Nous retiennent
De l’enfance
S’origine une bouche suave
Avide de caresser
Et dévorer le monde
Plus loin
Sous un tapis de pousses
Le temps s’est décimé
En couches sédimentées
D’un lendemain fertil
Surnagent des corps éruptés
Cocons lacunaires
En attente d’éclosion
Entre les feuillages
Les regards indomptés
Cherchent l’essence
De la germination
Les figures de pierre
Créent la matière
Le discernement d’ombres
Où riccoche la lumière
A l’intérieur
Des pierres endormies
Balbutie l’abîme
Sara ANTOINE
sarant@wanadoo.fr
La grâce de la Grèce
La grâce de la graisse
Antique, mythique
Déformée, déstabilisée ?
Par la décadence
Du nouveau monde
De quelle République
Pour quel public
Averti
Réduit
Par l’absence de la culture
Des repères
Sans regard vers un retour,
En arrière
Vers un futur
Plein de grâce
De l’harmonie
Suivant des traces
De la mythologie
Grecque,
L’amour de la nature
Et de la fête
Le voyage
Les rebondissements, les cris de la joie
Les hurlements des vents
La narration des voix
Déchainées
Au nom de Zeus
Pallas Athéna
Quelle muse
Animait l’artiste
Le sculpteur des corps
Où l’humanité
N’est pas loin des porcs
Des animaux
Animés
Dans un vrai bestiaire
De frivolité
De l’insouciance
Même s’il y avait l’odeur rancie de la guerre dans l’ère
Du temps d’autrefois
Où la vie
Était remplie de la grâce
De la bénédiction des dieux
Et déesses
Qui sonnaient leur accord
Avec noblesse
Pour aider des peuples en bas
Trouver leur bonheur, défricher leurs voies
Vers le futur, faisant marche arrière
Ecoutant les voix
Qui faisaient trembler la terre
Avec la matière
Vivante
Comme modèle
Le sculpteur des desseins
Façonne l’homme ou la femme
À partir de l’argile
Ou du ciment
Mélangé avec de l’eau
Et du sable
Pour représenter sa pensée
Avec ses mains
Qui sculpte son dessein
Retouche ses formes
Car avec le temps
Il y a un changement de bornes,
De normes
De styles et contextes
Qui nécessite
Un renouvellement des textes
Et sous-textes
Gravés dans le marbre
Le ciment
Avec un coup
De glaive
Ou d’un calice
Pour symboliser le partage, avant le supplice
Quand l’oreille tombe
Devant la stupéfaction
D’un nouveau monde
Rempli de la grâce
De la joie
Dans l’instant qui s’efface
Avec de la matière
Populaire,
Polluante, corrosive, peu chaire
Comme le ciment
Omniprésent
Dans la construction de notre ère
Industrialisé
Mécanisé
Ou l’homme est devenu marchand
Une source de richesse
Qui vagabonde
Cherche son bonheur
Sur les routes et les chutes des voies navigables de la terre
Mère
Pour transmettre quel amour
Aux habitants éphémères
Trace les desseins du sculpteur
Pour modeler notre ère ?
Illustrer nos formes, nos dieux et déesses
Nos points d’orgues, nos bassesses, nos avilissements, nos vulgarités
Erotiques
Où éros
Les héros
Sont plus que mythiques, mystiques
Christopher Brook
chrisbrook@hotmail.fr
Mélancolie minérale
La bouche en œuf, en fleurs de dents de lait, le lait de la belle ou de la laide
c’est selon.
Elles regardent, elles badent, un trou du séant ou du néant, un trou, deux trous, des trous, des yeux peut-être…
Elles en ont les bras qui tombent, ce qu’elles voient là-haut ce qu’elles voient !
ce qu’elles digèrent dans leur trou d’amour, leur trou de bile, leur trou de
salive, et ça plisse et ça pisse d’indolence
Touchez, touchez, c’est permis ! c’est vivant, ça vibre
Touchez vite avant que ne s’épanche le liquide nourricier, l’humus, le calcaire,
la poudre de fougère, le cacas de lait des oiseaux, elles plantent là, elles sentinellent, sentent l’aile des hirondelles, elles s’épanchent, murissent, elles
déversent leurs rondeurs flasques et mièvres
Touchez, touchez, c’est vivant ! ça vibre, et ça compte, ça fait l’inventaire, un
rosaire du regret, un geais, une pies, une buse, des étourneaux, deux
machaons, des scarabées,
Touchez tant qu’il y en a…
Oh, leur chant enfoncé dans la gorge ! leur gorge de sain doux, des seins doux,
c’est selon, elles font quelques malices, elles paradent au jardin, l’air de rien,
oh, ce qu’elles voient là-haut et que l’on ne voit plus ici-bas ! Satie, satine, des
gymnopédies pour genoux de mélasse, d’humus, minérale mélancolie pour
quelques ancolies, jolies.
Mireille JAUME
mjaume070@gmail.com
https://www.zigzag-arts-adaptes.com/
https://balbutio.jimdofree.com/
Il y a le corps
Il y a le corps
Toujours et encore
Dans un premier accord
Un corps à nous
Un dialogue sans effort
Nu en nature, en décor,
Où le silence s’imprime
Il y a les corps
Toujours et encore
Dans leurs ultimes ressorts
Un corps à vous
Qui s’étire à bâbord
Une matière sans remord
Où notre regard s’intime
Il y a les corps
Qui racontent
Toujours et encore
Je les attends
Je les entends
Depuis si longtemps
Et jusqu’à la métaphore
V. Gabralga
Philippe Raimbault
Alias V. Gabralga
Cachées dans les Bois
I
Comme la biche prudente
Je me dérobe à vos regards
Je vous attends
De minuscules brindilles frissonnent
Agitées par le vent
J’entends vos pas
Glissant sur les feuilles
Amis visiteurs, trouvez-moi avant ce soir
Car plus tard
Sans pitié
Je vous emporterai au fond des bois
Pour vous livrer à la fille du Seigneur du Vent
II
Je suis la fille du Seigneur du vent
Figée dans la pierre
J’attends mes amants
Sur la mousse douce de la clairière
Gisent leurs corps sanglants
Mon père m’a fait cette promesse
Je serai délivrée dans cent ans
Les papillons blancs caressent
Délicatement ma peau de pierre
Sous les rayons du soleil
Ils sont resplendissants
Comme mes prétendants
Ils m’aiment joyeusement
Durant un bref instant
III
Je suis le Passeur du temps
Sur mon cheval, dressé dans la pierre,
Je garde la porte du royaume, silencieusement
Mais
J’entends le sifflement des vers de terre
Infiniment petits et infiniment grands
Qui digèrent le corps de ses amants
J’entends le bruissement de l’herbe
Sous ton pas effrayé
Promeneur, détourne tes regards
Eloigne toi, si jamais il est encore temps
IV
Nous sommes les combattantes de son armée de pierre
Autrefois bien vivantes et des ombres maintenant
Aussi prends garde de nous rencontrer dans ces bois
Immobiles et pourtant puissantes
Nous voudrions t’emporter et te conduire au Néant
V
Passant, nous t’avions prié d’éviter ce chemin
Il est trop tard maintenant
Corinne VIRET
Site Internet : https://sites.google.com/view/siteartistiquedecorinne/accueil
Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100011895136656
Femme
Femme
ôte sa robe
suspend son geste
éternellement
Femme
s’allonge parmi les lierres
pose esquissée
définitivement
Femme
offre sa chair de ciment
marche en avant
évidemment
Femme
se déhanche
et attend
longtemps
Femme
regarde sans regarder
d’un air étonné
le temps passé
et l’escargot
homme ou femme ?
ou les deux
éperdument.
Cécile Luquet
On peut me retrouver sur Facebook, Plume du Papillon.
La Vie
La vie reçue, la vie donnée
La Femme, Vénus double, Spirale, Cantatrice, République, avec le cerf ou l’escargot, dans la nature, au jardin ou en parade…
Elles sont là, belles, rondes, voluptueuses
Sensualité, Erotisme, Liberté
Elles sont TOUT cela
Nous rentrons dans leur intimité
La Vie exulte sous les plis, les ventres s’arrondissent
La Vie est là
Exaltation des formes pleines
J’entends le doux murmure de la Beauté
J’entends dans le geste de l’artiste un cri de liberté
Amour, Beauté, Liberté
J’entends que la vie est belle, malgré tout
Merci
La Vie reçue, la vie donnée
Encore et encore, malgré tout
Anne Giret
anne.costes@cegetel.net
A la jonction du monde
A la jonction du monde
Il y a
Le peuple premier
A l’origine de la ronde
Un cœur sacré
Au fil des secondes
L’éternité
Notre éternité
Posée au bord de l’univers
Comme une perle de joie
Lovée dans l’âme de notre Terre
Entre émerveillement et effroi
A chaque pensée qui s’effondre
Renaissent la Vie et nos émois
A chaque caresse profonde
Jaillissent nos amours qui se noient
Créer, mourir, crier, partir
Embrasser la chair de nos délires
Et puis sourire
Aimer, haïr, chanter, souffrir
Délaisser le meilleur et le pire
Enfin s’ouvrir
A la jonction du monde
Il y a
L’infini qui trépasse
A l’origine de la ronde
Nos peurs fugaces
Au fil des secondes
La grâce
Notre grâce
Sylvie Cabioc’h
sylvie.cabioch@wanadoo.fr
https://www.facebook.com/cabioch.sylvie
J’ai découvert un grand jardin
J’ai découvert un grand jardin
Niché au cœur de Valmondois
Un peu broussaille, un peu pagaille
Libre et sauvage tel ce grand bois
Là-bas près de Vallangoujard
Je vais m’y perdre à la rencontre
De tout un peuple fantastique,
Cœurs battants de subtile alchimie,
Bêtes ou hommes, êtres vibrants
Sous la rudesse du ciment
C’est la finesse de la vie…
tout simplement
Là, des cavaliers, dignes et droits
S’arriment à des chevaux fantasques
Qui sanctifient le ciel de joyeuses ruades.
Là, un grand cerf pacifie l’espace
Où médite une femme
Et des femmes, des femmes, fortes et si vivantes
Se marient au grand Tout de la nature heureuse
Un peu broussaille, un peu pagaille
Comme la vie tout simplement
Et celle qui va renaître, bientôt sous les ombrages
D’une autre femme au ventre rebondi
Dans la pure rusticité d’une œuvre de ciment.
Mais là, sous la feuillée, à peine entr’aperçu
Un visage de femme, simple et nue,
À la fois rude et fine, dont les yeux, grand fermés,
Cachent l’extase du sculpteur
Qui ne l’a pas abandonnée.
Sous son front calme et lisse
Naissent les mots d’une prière,
Juste une action de grâce
Et sa bouche frémit,
Ode à la vie………………tout simplement.
Hélène Buscail
helenebuscail483@gmail.com
Chimères
Je les vois, à vif
Les bouches, des bouches
O O O, Ouvert, Orée, Ogive, Orage,
Ô prières, qui n’ont pas besoin de mots.
Hurlantes, Ouvrantes.
Au jardin dans la nuit, je les entends entre le lierre
Se frotter, se froisser, s’affoler,
Les chimères.
J’ai peur.
Elles me hantent, les chimères
Leurs bouches d’O, d’eau qui coule au loin
Ravine, Babine.
Me hantent : je suis leur voisine.
Passer devant la clôture la nuit
Voir leur courbure, la nuit.
Me regardent en coin, me murmurent :
La fin de notre monde, enfin arrive.
Et elles vont vivre elles, oh oui !
Bouches ouvertes, elles sont de retour,
Chantant le nouveau temps mythique, la naissance des hybrides.
Oui vivantes, plus que vivantes !
Dans la forêt chimérique, métastable, métamorphique,
Elles se prennent, s’éprennent, s’étreignent, se mêlent
Tas de ciment,
Végétal Minéral Animal
Elles se coulent, dégoulinent.
Je suis elles.
Je suis glaise, tas de terre, sac de sable
Je comprends la nuit leur éclat blanc qui m’attire.
Elles sont moi,
Femmes, oui, des Grâces
Par trois :
Un, horizon grand ouvert
Deux, jeu tactile
Trois, pointe vive
Elles et je dans le noir.
Je n’ai plus peur alors, je vis je veux
Me joindre à leur danse.
Moi-passagère,
Devenir-chimère.
Marie-Emilie Porrone
Instagram / @ecriredelamaingauche